L’« Unité de Logements et Service » du GIHP : une vie plus autonome pour les personnes en situation de handicap moteur
Type d'action
- Accessibilité
- Aides techniques et technologiques
- Habitat / logement
- Partenariats / transversalité
- Personnes handicapées
- Pratiques professionnelles
- Soutien à domicile
Département
Hérault (34)Sur le vif
« Quand j’ai entendu parler du projet, c’était inespéré. J’allais pouvoir partir de chez mes parents, les soulager et surtout vivre comme j’en ai envie, à mon rythme. Je vois mes amis, je sors le week-end, je vais à mes cours de chant. Le tram est tout près et grâce à la permanence, je me sens en sécurité ». Amélie, 31 ans, souffrant d’une myopathie.
Porteur(s) de l'action
Groupement pour l’insertion des personnes handicapées physique (GIHP)
Objectif(s) et bref descriptif
Dans l’agglomération montpelliéraine, le GIHP permet à des jeunes adultes en situation de handicap moteur lourd de faire le choix d’une vie à domicile. Une dizaine d’appartements adaptés aux personnes en fauteuil ont été aménagés dans une nouvelle résidence de logements sociaux. Un SAAD géré par le GIHP assure une permanence 24 heures sur 24 au sein des domiciles. Cette aide, financée dans le cadre d’une mise en commun partielle de la Prestation de compensation du handicap (PCH) de chaque locataire, leur permet de mener une vie autonome et de réaliser leur choix de vie.
L’essentiel :
Date de création : avril 2019
Population concernée : Jeunes adultes en situation de handicap moteur, en capacité de gérer leur vie de façon autonome mais dont les déficiences ne leur permettent pas de vivre dans un logement ordinaire sans aides assurées 24 heures sur 24.
Caractéristiques : bénéficier d’une Prestation de compensation du handicap (PCH) comportant en moyenne sept heures par jour d’aide humaine.
Zone d’implantation : Castelnau-le-Lez, commune de l’agglomération de Montpellier, qui compte plus de 20 000 habitants. Dans un nouveau quartier, à 300 mètres d’une station de tramway qui dessert le centre-ville de Montpellier et à quelques minutes en transport d’un centre commercial.
Configuration de l’habitat : 10 appartements de type 2, adaptés et domotisés, intégrés dans une petite résidence de logements à loyer modéré comprenant 22 appartements.
Partenaires : Agglomération de Montpellier, Astria, CCAH (Groupe IRCEM, Klésia, Malakoff Médéric Humanis), Caisse d’Epargne, Caisse des Dépôts et Consignation, Etat, Département de l’Hérault, Région Occitanie, Un Toit pour Tous (groupe Habitat en région), Ville de Castelnau-le-Lez
Programmes, AAP, AMI : Appel à Projet CCAH
Spécificités : Des logements adaptés et domotisés, associés à une permanence intégrée 24/24 et 7 jours/7 d’auxiliaires de vie, financée par une mise en commun partielle de la PCH.
Cette action a été identifiée dans le cadre d'un appel à contribution diffusé en mars 2019, en partenariat avec la CNSA.
https://www.youtube.com/embed/IH8m0zMnbRg
Origine(s)
Le GIHP Occitanie Languedoc Roussillon, est une association reconnue d’utilité publique, membre du réseau GIHP, fondée à la fin des années 60 par des étudiants en situation de handicaps moteurs et sensoriels, qui revendiquaient le droit à des aides leurs permettant de compenser les conséquences de leur handicap et de mener une vie autonome. Afin de répondre à ses ambitions, l’association gouvernée par des personnes en situation de handicap, a développé progressivement plusieurs services : service de transport adapté composé d’un parc de plus de 150 véhicules, un Foyer d’Accueil Médicalisé pour des étudiants et des personnes en formation professionnelle à Montpellier, un accueil de jour à Sète, un SAMSAH de 18 places, un SAAD spécialisé qui intervient 24h/24, avec une ronde itinérante de nuit et qui assure 250 000 heures annuelles d’aide humaine. Dans le cadre d’une convention avec le Département de l’Hérault, l’association assure également le suivi d’une vingtaine de familles d’accueil et la réalisation d’évaluations à domicile pour les besoins d’aide humaine et d’adaptation du logement.
Depuis sa création, le GIHP milite pour le respect du choix de vie des personnes en situation de handicap et leur intégration dans la société, comme citoyen à part entière. Fort de ces principes, l’association a donc développé dans les années 80 le modèle des Unités de Logements et de Services (ULS), permettant à des personnes vivant avec un handicap moteur parfois important, de vivre de façon autonome et en toute sécurité à domicile. Les ULS associent des logements adaptés (conception architecturale, domotique) à une permanence d’aide humaine, assurée sur site 24h/24. Ils répondent à plusieurs constats établis par le GIHP : d’une part les personnes en situation de handicap moteur ont de grosses difficultés à accéder à des logements adaptés, en raison d’un parc trop peu développé ; d’autre part, celles qui disposent d’un plan d’aide humaine dans le cadre de la PCH, ont rarement un nombre d’heures suffisant pour leur permettre d’avoir une vie sociale à l’extérieur. Ainsi, des USL ont été développés au Havre, à Paris, à Toulouse et à Lyon.
Celui de Castelnau-le-Lez est la première expérience de solution alternative entre le domicile et l’établissement à destination de personnes en situation de handicap moteur, conduite en Languedoc-Rousillon. L’USL est le résultat d’une collaboration entre le GIHP Occitanie Languedoc Roussillon, Un Toit pour Tous, premier acteur privé de l’habitat social sur la région et la Mairie de Castelnau-le-Lez, deuxième commune de Montpellier Méditerranée Métropole (M3M) et propriétaire du terrain. Un important travail a été conduit en amont entre le GIHP et plusieurs partenaires : sur la conception des espaces avec le cabinet d’architecture en charge du projet, en tenant compte de l’expertise d’usage des personnes en situation de handicaps; sur la mise en commun de la PCH avec la MDPH et le Département de l’Hérault qui l’expérimentaient pour la première fois ; sur l’attribution des logements avec les réservataires.
Après deux ans de travaux, les premiers locataires ont emménagé à l’Ecrin des Meulières en avril 2019.
Description détaillée
Un environnement favorable à l’autonomie
Situé légèrement en retrait des grands axes, au bout d’une allée en cul-de-sac qui ouvre sur la garrigue, rien ne distingue en apparence l’immeuble qui abrite l’ULS des bâtiments individuels ou collectifs de ce quartier en construction. Son architecture résolument contemporaine s’est adaptée à la contrainte d’un dénivelé important, permettant ainsi à deux des trois niveaux d’être accessibles de plain-pied depuis l’extérieur et les espaces de stationnement sécurisés par des barrières. Les dix appartements aménagés pour les personnes en fauteuil ont tous été répartis sur ces deux étages. Pas de hall d’entrée, ni de couloirs pour accéder aux appartements, mais des coursives extérieures ouvertes sur un patio végétalisé, qui desservent les appartements à chaque niveau et un ascenseur qui permet à ceux qui ne peuvent pas emprunter les escaliers, de se déplacer d’un étage à l’autre.
Chaque logement ouvre sur une pièce à vivre, comprenant une cuisine à l’américaine et un accès à une terrasse. Cette pièce dessert une grande chambre et une vaste salle de bain attenante, équipée d’une douche à niveau de sol. La séparation entre les pièces se fait par des portes coulissantes. La conception de chaque appartement a été étudiée pour permettre le déplacement d’un fauteuil et l’installation d’éventuelles aides techniques. Les appartements sont également équipés d’un système domotique très complet (motorisation des volets et des portes palières et d’accès à la terrasse, verrouillage de la porte palière, allumage et extinction automatique des éclairages en fonction de la luminosité et de la présence dans une pièce… ainsi que d’un système d’appel à distance vers la permanence des auxiliaires de vie. En plus des commandes classiques, tous les locataires de l’ULS disposent d’une interface adaptée à son handicap (téléthèse) qui lui permet d’interagir avec l’ensemble des équipements domotiques et l’ascenseur. Chaque locataire peut ainsi contrôler son environnement et accéder quand il le souhaite à l’extérieur de son logement. Des aménagements de voirie ont d’ailleurs été réalisés par la métropole (M3M) pour faciliter le cheminement des personnes à mobilité réduite, habitants de l’ULS mais également de la maison de retraite proche, vers la station de tramway située à environ 300 mètres.
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Chaque habitant est locataire en titre de son appartement auprès du bailleur. Le montant du loyer pour ces logements PLAI ou PLUS sont inférieurs à 400 euros par mois, charges comprises, avant déduction des aides au logement.
Des locataires jeunes et indépendants
Les dix locataires, hommes et femmes, qui occupent les logements, sont toutes des personnes en situation de handicap moteur, de naissance, à la suite d’une maladie ou d’un accident (Infirmité Motrice Cérébrale, myopathie, tétraplégie) Majoritairement jeunes, entre 26 et 35 ans, à l’exception de deux d’entre elles plus âgées, elles vivaient précédemment dans des conditions qui ne leur permettaient pas de réaliser leur projet d’une vie plus autonome (logement familial ou inadapté, établissement, éloignement de leurs proches…). La création de l’ULS leur en a donné l’occasion et pour d’eux d’entre-elles, leur séjour en Foyer de Vie Médicalisé (FAM) du GIHP a constitué un tremplin vers cette autonomie. Toutes pratiquent au quotidien de nombreuses activités (études, loisirs, travail pour trois d’entre elles, suivis médicaux…), une vie sociale active et souhaitent pouvoir se déplacer librement. Pour intégrer ce dispositif, dont elles ont eu connaissance par leur réseau personnel, par les professionnels qui les accompagnent ou par la communication autour du projet, chacune a pris contact avec le GIHP qui a procédé à une première sélection. Plusieurs critères ont été pris en compte : les ressources de la personne pour prétendre à un logement social (tous les locataires sont bénéficiaires de l’Allocation Adulte handicapé – AAH), l’attribution d’une PCH, dont le plan d’aide humaine doit compter environ sept heures quotidiennes pour envisager une mise en commun partielle, la capacité à assumer la gestion du quotidien, le projet de vie… L’examen d’une trentaine de dossier a été nécessaire pour retenir les dix locataires actuels, ce qui implique de constituer à l’avenir une liste d’attente pour pallier rapidement le départ de l’un d’eux. Chaque personne a également déposé une demande de logement social, puis la commission d’attribution des logements a statué sur son dossier. L’ensemble des candidats proposés par le GIHP ont pu obtenir un appartement.
Une vie quotidienne la plus « normale » possible
Au-delà de l’adaptation des logements, l’intérêt du dispositif de Castelnau-le-Lez repose sur les six auxiliaires de vie de permanence présentes au sein même de l’immeuble, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 sept. Salariées du SAAD géré par le GIHP, elles ont toutes été formées à l’accompagnement de personnes en situation de handicap moteur. Elles interviennent par roulement, de 8h00 à 20h00, puis de 20h00 à 8h00, dans le cadre d’un planning établit sur deux ou trois jours d’intervention dans la semaine. Installées dans un local dédié au sein de l’immeuble, elles sont en lien avec chaque locataire grâce à un système d’appel, relayé vers leur téléphone portable lorsqu’elles sont déjà en intervention. Leur mission est de répondre aux demandes notamment non programmables des locataires : se faire aider pour aller aux toilettes, se servir un verre d’eau, enfiler une veste, assurer un coucher tardif… Tout ce qui peut apporter de la spontanéité à la vie quotidienne et faire qu’elle se rapproche le plus possible de celle d’une personne valide. En moyenne, la permanence assure une quarantaine d’interventions par 24 heures. Le financement de ce service repose sur la mise en commun partielle des heures d’aide humaine de PCH, soit environ 2 heures 40 par jour et par locataires. Un logiciel de liaison permet d’enregistrer l’historique des interventions et d’assurer un suivi et une transmission entre intervenants ainsi qu’entre le siège et le département qui verse directement la PCH consommée au GIHP.
De plus ces locataires ont également recours au même service d’aide à domicile du GIHP pour tout ce qui relève des aides programmables de leur plan : toilette, habillage, aides aux repas, aides aux déplacements et à la vie sociale. En cas d’absence d’un de ces intervenants, la personne ne se retourne pas vers la permanence mais vers le dispositif d’astreinte du SAAD. Ainsi, la partie de la partie de la PCH mise en commun ne sert pas à de l’aide individuelle. Enfin, cinq locataires sont également accompagnés par un SAMSAH de leur choix : celui du GIHP pour 3 d’entre eux et celui de l’Association des Paralysés de France pour les deux autres.
Un premier bilan globalement positif
A peine un an après leur emménagement, les dix locataires de l’Ecrin des Meulières semblent trouver leurs marques dans leur nouvelle vie. Comme tous les occupants intégrant un logement neuf, ils ont dû « essuyer les plâtres », notamment sur le réglage de la domotique. Malgré une collaboration étroite avec le bailleur et l’architecte, toutes les contraintes liées aux normes de construction n’ont pu être anticipées. Ainsi, les seuils extérieurs ont dû être réaménagés a posteriori avec la pose de plans inclinés et la motorisation des portes a dû être renforcée. Dans la mesure du possible, le GIHP laisse chaque habitant organiser sa relation avec le bailleur qui assure la gestion locative tout en s’efforçant de sensibiliser ce dernier aux problématiques liées au handicap et d’accélérer si besoin la résolution des problèmes grâce à la qualité du partenariat existant. Depuis leur emménagement, les habitants de l’Ecrin des Meulières apprécient de pouvoir vivre à leur rythme, de pouvoir se déplacer sans contraintes, d’avoir une vie de voisinage au sein de l’immeuble (certains ont participé à la fête des voisins). Aucun n’éprouve cependant le besoin de disposer d’un lieu partagé ou d’une animation de la vie sociale au sein de l’immeuble, comme cela a été mis en place dans l’ULS de Lyon, où le GIHP s’est vu confier, à la demande du bailleur, l’animation du « vivre-ensemble » entre les habitants des 75 logements. En revanche, ils reconnaissent unanimement la plus-value en matière de sécurisation et de respect de leur intimité, que leur apporte la permanence des auxiliaires de vie.
Bilan
Points positif :
- L’expertise de l’association en matière de prise en charge des personnes en situation de handicap moteur et sa reconnaissance par les différents partenaires.
- La collaboration avec le bailleur, notamment en matière d’adaptation des logements.
- L’expérimentation de mise en commun de la PCH par le Département de l’Hérault, qui a permis la mise en place d’une permanence 24 heures sur 24, favorisant la sécurisation et l’autonomie des personnes en situation de handicap moteur.
- La vigilance dans la mise en œuvre des plans d’aide pour différencier ce qui relève de l’aide individuelle et de l’aide mutualisée.
Points d’attention :
- Les contradictions entre les normes de constructions et les besoins d’adaptation fonctionnelle du logement lié au handicap moteur.
- Les limites à l’intégration d’un tel dispositif dans le cadre de l’article 20 de la loi ASV (absence de salle commune).
- L’anticipation du renouvellement des locataires, en établissant une liste d’attente et en travaillant en amont avec les réservataires.
- Le relatif éloignement entre les logements et les commerces et des lieux d’activités, dans un quartier qui devrait à terme accueillir ses équipements.
Partenaire(s)
Agglomération de Montpellier, Astria, CCAH (Groupe IRCEM, Klésia, Malakoff Médéric Humanis), Caisse d’Epargne, Caisse des Dépôts et Consignation, Etat, Département de l’Hérault, Région Occitanie, Un Toit pour Tous (groupe Habitat en région), Ville de Castelnau-le-Lez.
Moyens
L’investissement :
- Le montant du programme immobilier, constitué de 22 logements sociaux en PLAI et PLUS s’élève à plus de 2 millions d’euros, d’aides ou de prêts de l’Etat, de la région Occitanie, de l’agglomération de Montpellier M3M, de la Caisse des dépôts et consignations, d’Astria (1% logement).
- Le surcoût lié à l’adaptation des logements et à la mise en place de la domotique s’élève à environ 100 000 euros, soit 10 000 euros par logements, financés par le recours au mécénat, notamment du fonds Caisse d’Epargne (50 000 euros) et du CCAH (23 000 euros du Groupe IRCEM).
Le fonctionnement :
- Les locataires versent au bailleur un loyer mensuel d’environ 400 euros, avant le versement de l’allocation personnalisée au logement, à laquelle peuvent prétendre les locataires. Ce montant comprend les charges locatives, qui intègre la maintenance du système d’appel vers la permanence.
- Le GIHP verse un loyer mensuel au bailleur pour le local de permanence (bail commercial). Ce coût est intégré au budget de fonctionnement du SAAD.
- La permanence des auxiliaires de vie est financée par la mise en commun partielle de la PCH entre les 10 locataires. Cette mise en commun correspond à 2 heures 40 par jour et par locataire, sur la base d’un plan d’aide d’environ 7 heures par jour. Les heures de PCH consommées sont directement versées au GHIP.
Contact
Lise JOVET
Groupement pour l’insertion des personnes handicapées physique (GIHP)
Adresse : 41 rue Hippolyte Fizeau, 34000 Montpellier
Tél. : 04 67 02 93 48
Courriel : uls@gihplr.org